Evelyne Ramelet menait une vie aisée, épouse d’un homme d’affaires grec, millionnaire en euros. Elle vivait à l’étranger, voyageait, assistait son mari dans son travail. Tout a basculé lors d’un divorce brutal. Du jour au lendemain, Evelyne Ramelet s’est retrouvée sans toit ni argent. Elle s’est réfugiée à Lyon, chez son fils étudiant qui vivait dans un studio en étage sans ascenseur, escaliers fatals aux jambes d’Evelyne : une chute, de multiples fractures, suivies d’infections nosocomiales à base de staphylocoques et de streptocoques durant l’hospitalisation. Elle conserve aujourd’hui une difficulté à marcher et à rester debout, accompagnée de douleurs. Lors de son hospitalisation, en 2000, Evelyne a repris pour vivre une activité d’écriture qu’elle réalisait naguère pour le plaisir. Elle a prospecté les magazines afin d’obtenir des piges; un magazine Internet féminin lui commande des fiches de recettes de cuisine, elle en rédige 1.300 ! Elle écrit également pour d’autres publications, prospectées sur le web, bien que peu payée : « Ça m’a sorti d’affaire, psychologiquement, et m’a mis en relation avec la presse ».

Après sa sortie de l’hôpital, avec un traitement médicamenteux lourd, elle apprend la mort de son mari et entre dans une dépression qui dure un an, « un second coup de massue ». Durant cette période, elle écrit encore, un livre de recettes pour France Loisirs et quelques piges pour des magazines. Elle s’installe à Amélie les Bains, station thermale des Pyrénées dans laquelle son mari avait acheté une maison et que le juge liquidateur de la succession lui attribue, au grand dam des autres héritiers qui entrent en guerre juridique. Installée au calme, Evelyne Ramelet secoue sa déprime à l’incitation de parents; elle décide de se réinvestir dans une activité et veut créer un commerce d’art de la table. Le directeur de Cap Emploi des Pyrénées Orientales passe son projet et sa motivation au grill avant d’appuyer une demande de subvention auprès de l’Agefiph, en mars 2003.

Ce qu’Evelyne n’avait pas anticipé, c’est la crise du tourisme thermal et la concurrence espagnole: l’augmentation constante des taxes françaises sur le tabac et les carburants attire la clientèle en Espagne où elle en profite pour faire ses emplettes à meilleur prix dans des zones commerciales frontalières qui connaissent une expansion rapide. Face à un chiffre d’affaires en dents de scie et à une déconfiture prévisible, Evelyne décide de réorienter son activité vers la communication d’entreprises et la création d’événements; elle s’appuie sur un réseau d’amitié qu’elle a su créer grâce à son sens de la relation humaine. Elle travaille avec la ville d’Amélie les Bains à la promotion de la viticulture et de la gastronomie locales, prépare le lancement d’une gamme de parfums portant le nom de villes du Roussillon…

Si Evelyne Ramelet est encore loin d’avoir retrouvé l’aisance financière, son entreprise, Catalunya Communication, a des comptes équilibrés. Evelyne veut désormais partager son expérience avec d’autres créateurs handicapés; elle a créé l’association « Entrepreneurs d’abord » avec d’autres personnes sensibilisées. Leur objectif est de mutualiser les compétences, apporter un soutien matériel et physique (par exemple en remplaçant un gérant le temps d’une brève hospitalisation), dispenser des conseils de gestion, informer les candidats créateurs. Evelyne avoue consacrer la majeure partie de son temps au travail, par goût, peut- être également par volonté de retrouver la femme d’affaires qu’elle était à l’époque où elle secondait son mari. A 50 ans, elle n’avait pas de profil cadré pour envisager un travail salarié. Alors elle poursuit prudemment le développement de ses activités en profitant, le soir, du cadre sylvestre de sa maison des Pyrénées…

Laurent Lejard, février 2005.

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